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10/11/2005

Michel Houellebecq en est un fameux

Mes lectrices et lecteurs me pardonneront, mais je n'ai pu me résoudre à l'emploi de ce « petit vocable de trois lettres pas plus » qui doit être compris au sens de Brassens bien sûr.

Michel Houellebecq , au départ, je ne savais pas trop qui il était. J'avais entendu parler de sa sortie sur l'Islam à l'occasion de son roman « Plateforme », mais c'était quasiment tout. Mais depuis que je fréquente certains blogs, des blogs d'écrivains en particulier, je lis beaucoup de choses sur lui. Des choses négatives et des choses positives, positives au point que certains le considèrent comme l'écrivain de sa génération. Sa génération étant la mienne, j'ai commencé à m'y intéresser sérieusement. Je me suis beaucoup tâté à la sortie de son dernier bouquin, « La possibilité d'une île » mais mon instinct, qui se trompe rarement, m'a retenu. J'ai lu aussi certains de ses textes publiés sur Internet.

 

Et puis, l'autre jour, dans un supermarché, je tombe sur « Rester Vivant » dans une de ces collections à 2€. Je feuillette en attendant à la caisse et tombe sur les deux pages d'un article intitulé : « Jaques Prévert est un con ». Texto. Là, je me suis dit que mon instinct avait été sûr. Prévert, dans mon Panthéon personnel est très haut. Et puis on ne traite pas les gens de « cons » comme cela, la moindre des choses est de dire pourquoi, d'argumenter un minimum. Et là, j'ai trouvé Houellebecq très léger. Qu'il n'aime pas Prévert c'est son droit, mais à partir du moment ou il publie son opinion, il a les devoirs de tout critique qui se respecte. En même temps, j'ai trouvé que son texte révélait pas mal de choses sur lui. Pour commencer, il met en avant le Prévert qui écrit sur les fleurs, les oiseaux et l'amour, histoire de donner une image de légèreté. Il évacue le Prévert social et politique, celui qui écrit sur l'oeuf dur et le poète de La Crosse en l'air. Pourtant, ce dernier texte écrit à chaud lors du début de la guerre d'Espagne est l'une des oeuvres maîtresses du XXe siècle, indispensable pour le comprendre. Un texte dont, il est vrai, il est difficile de trouver l'équivalent aujourd'hui.

 

Houellebecq reproche ensuite à Prévert le réalisme poétique. Le Crime de M Lange, Quai des brumes, Les Enfants du Paradis, tout ça ne plaît pas à Houellebecq. Pourquoi ? On ne sait pas, c'est comme ça. Comme c'est intéressant. Après tout, ce n'est que l'un des mouvements majeurs du cinéma français, voire européen, qui a engendré entre autres le néo-réalisme italien. "Répugnant" dit-il. Je serais curieux de savoir ce qu'il trouve de répugnant dans les yeux de Michèle Morgan. Et dans la foulée, il ignore la veine iconoclaste des films avec son frère Pierre ou le superbe Roi et l'Oiseau réalisé par Paul Grimaut.

Premier indice, Houellebecq met Prévert dans le sac de Brassens et de Vian, sac qu'il estime frappé d'optimisme. Étonnant non ? Cela donne surtout une idée du niveau de noir des sombres pensées de notre auteur.

 

Ensuite, on attaque la forme : Prévert serait un poète médiocre. Plutôt que de vous infliger une longue dissertation, je vous renvoie à un article sympa d'un autre défenseur. Et je vous propose ce petit jeu :

Citation 1 : « Paris est tout petit pour ceux qui s'aiment comme nous d'un aussi grand amour. »

Citation 2 : « J'étais seul au volant de ma Peugeot 104; avec la 205 j'aurais eu l'air plus frime. »

Un poète authentique s'est caché derrière l'une de ces citations, saurez vous le reconnaître ? Je sais que c'est facile mais c'est pas moi qui ait commençé. Pour être tout à fait honnête, Houellebecq a quand même écrit des choses plus intéressantes.

On en arrive au fond du problème : Prévert fait de la mauvaise poésie parce que sa vision du monde est « plate, superficielle et fausse ». Parce que c'est un libertaire. Rien que cela. Il aurait fallu aller plus loin. C'est surtout parce qu'il ne partage pas la vision déprimante, sinistre, résignée et cynique de Houellebecq qui sait, lui que noir c'est noir et qu'il n'y a plus d'espoir. D'ailleurs, il vit isolé en Angleterre avec un chien alors que cet andouille de Prévert vivait à Paris avec des chats. Quelle idée.

 

Je pense alors à ces paroles de la chanson « Triste compagne »du dernier et excellent album de Bénabar « Reprise des Négociations » :

Ce n'est pas non plus du spleen pourtant c'est toujours à la mode,
Mais c'est de la déprime qui frime le spleen,

C'est beaucoup trop snob.

 

Houellebecq est dans une posture dépressive (qui ne l'empêche pas de lancer son dernier bouquin comme le nouvel Harry Potter), alors que Prévert croyait en quelque chose de beau et le disait haut et fort dans ses oeuvres. Un poète, ça fait surgir des images et quelle plus belle image pour l'espoir que ces derniers vers :

Et le veilleur s'en va la casquette sur la tête

L'oiseau blessé dans le creux de la main

Le chat de gouttière tient la lanterne

Et il leur montre le chemin

 

Mais, excusez-moi, Prévert ne serait pas un véritable poète. Houellebecq, lui, serait donc le peintre implacable de notre génération, celle des quarantenaires désabusés.

 

Dans Caro Diario, de Nanni Moretti, il y a une scène que j'adore. Moretti est dans un cinéma et sur l'écran quatre personnages gris discutent : « Notre génération.... que sommes nous devenus... tous complices, tous compromis.. » Moretti se lève et les apostrophe : « Vous disiez des choses horribles et violentes, vous avez enlaidit. Je criais des choses justes et maintenant je suis un splendide quadragénaire ». Et moi, je me lève aux côtés de Moretti parce que je me sens aussi un splendide quadragénaire, je suis avec une femme formidable et nous aurons une petite fille en mars et je lui lirais du Prévert :

"Quand vous citez un texte con, n'oubliez pas le contexte"

 

Commentaires

Salut, Vincent,

J'ai toujours pensé que tu serais un excellent critique de cinéma mais, après lecture de cette note, je suis persuadée que tu serais un très bon avocat.

Bel hommage rendu à Prévert que ta fille aura la chance de découvrir dans quelques années...

Et... pan sur le (Houelle) bec (q).

Bises.

Marie Thé

Écrit par : Marie Thé | 11/11/2005

Et en écrivant Houellebecq est un con, tu lui rends hommage.

C'est pareil avec prévert.

Au fond, Michel aime bien prévert.
En tout cas il admire son talent.

C'est léger.. prévert est un con.
J'aime pas prévert.
C'est débilisant..


Rien de grave.
Les vrais problèmes sont ailleurs.

Prévert n'a rien à prouver.

C'est beaucoup grave de réduire l'oeuvre de Houellebec à ce texte.
Ca c'est presque malhonnête.
Comme par exemple de ne pas citer les autres déclarations de Michel sur prévert..
Beaucoup plus tendres

Écrit par : Damien | 14/11/2005

Damien, vous ne me ferez pas croire une seconde qu'il puisse y avoir dans ce texte quoi que ce soit de tendre envers Jacques Prévert ni de son talent. Ou alors, nous avons des idées très éloignées de ce qu'est la tendresse.
Je ne réduit pas l'oeuvre de Houellebecq. à ce texte, mais je l'estime révélateur et c'est bien lui qui me pose problème. Ce texte là et pas un autre. Vous le trouvez léger, je le trouve lourdingue dans la provocation gratuite. Le vrai problème et bien là. Ce qu'il reproche à Prévert (comme en passant au réalisme poétique, à Vian, à Brassens) c'est l'expression d'un idéal qu'il ne partage pas. Une vision du monde qu'il réfute. Moi, qui aime Prévert, je ne partage pas la sienne et, à ma modeste échelle, je réfute son texte. Ceci dit, je serais curieux de savoir quels sont les autres écrits de Houellebecq qui parlent différemment de Prévert. Renseignez moi.

Écrit par : vincent | 14/11/2005

Voilà enfin la clef, donc, Damien laisse l'étrange commentaire ici et copie colle chez moi... pourtant le sujet n'était pas vraiment le même, même si la conclusion est assez identique. Damien n'est pas très subtil... (il a reposté depuis des choses carrément incompréhensibles). C'est décevant moi qui cherchait quelque chose derrière. En tout cas, ça me permet de découvrir ton blog, et rien que pour ça, c'est plutôt très bien! Et pas seulement parce que, il faut le dire, Houellebecq est un empafé.

Écrit par : secretdesdieux | 16/11/2005

... On est bien d'accord. Belle analyse Houellebecquienne... Et je te remercie pour ton lien :(http://www.lire.fr/portrait.asp/idC=49013/idR=201/idG=3) concernant le "Dantec"... Qui amène de l'eau à notre moulin, mais qui risque de "blesser" ses "accros" les plus amères...

Écrit par : Thierry | 29/11/2005

Merci

Écrit par : Jarvis | 17/02/2008

Mêle, mêle!

Il fait froid et/ou chaud, peu importe qui souffre!
Le bidon à idées a déclaré la paix:
il a trouvé comment marier demande et offre.
Et si, au bout, obus, la guerre éclate, ah mais,
ce n'était pas le but, nenni ne l'a voulu,
c'est la faute au dahut qui, oui-da, dans son jus!

Vacarme in the burnes, ça bout sous la calotte
du bidon à idées, il cherche à qui parler:
aux courbes attachées aux cloches qui grelottent.
Kesquoncroi! Il aime Rabelais et Marley
et se mêle à la rue, sus au tohubohu,
son coeur mis à nu y déborde de cigüe

Il fait froid et/ou chaud depuis que l'homme est l'homme!
Le bidon à idées entonne vérité
et les témoins de Jédésou, ça c'est un homme,
glouglou! La vie au fond verte ou grise est papier.
Heureusement, dis donc, qu'on sait, rouge pompon,
que « Prévert est un con », mais pas lui, le dindon!

Écrit par : Valentini | 18/12/2010

Joli :)

Écrit par : Vincent | 21/12/2010

"D'ailleurs, il vit isolé en Angleterre avec un chien alors que cet andouille de Prévert vivait à Paris avec des chats. Quelle idée."
merci (notamment) pour cet éclat de rire!
je partage la même opinion que toi, en tout cas : http://gemyjamade.blogspot.com/2005/09/michel-houellebecq-est-il-un-con.html

Écrit par : gemyjamade | 08/05/2011

HOUELLEBECQ n'est pas un con

Houellebecq est un agent de la production capitaliste. À la solde de l'impérialisme, forcément. C'est donc un monsieur sérieux. Pas comme moi. Ce qui ne l'empêche pas d'être un con. Je rigole. C'est du second degré. Je ne suis pas stalinien. Donc, agent du capital dans les rangs prolétariens. Seul un con pouvait écrire cette dernière phrase. C'est le retour du second degré.
Comment sortir de ça? De la connerie. En tant que présupposée, ça va de soi.

(lire la suite sur lapetiteguerre.overblog.com)

Écrit par : valentini | 21/05/2012

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