01/10/2005
Brenda Kahn, la talentueuse disparue
He says i'd grow lemon tree in a desert
days fly past and words fall slow
I'd have me a Mojave winters
I'd never feel lonesome i'd never feel cold
Le nom de Brenda Kahn n'est pas forcément évocateur. Il arrive pourtant que l'on tombe sur un admirateur de la chanteuse. Quelqu'un qui l'a découverte, le plus souvent, à l'occasion de son second album Epiphany in Brooklyn sortit en France en 1993. L'autre jour, je feuilletais un magasine de l'époque et j'y ai trouvé un article sur ce disque, un article élogieux car la presse française l'avait accueilli avec bienveillance, Télérama lui avait même fait l'honneur de son label. Personnellement, c'est une amie qui m'avait passé le disque « Ca devrait te plaire » m'avait-elle dit. Effectivement, j'ai été conquis dès la première écoute et très vite, je me passais en boucle la chanson « In Indiana » que j'aurais adoré utiliser un pour un film (qui ne s'est pas fait mais c'est une autre histoire).
The bridge was white in the morning sun
Stepping out of the taxi with a party dress on
Il a été plus difficile de se procurer les deux albums qui ont suivi, comme de retrouver le premier Goldfish Don't Talk Back. Brenda Kahn ne perçait pas bien qu'elle ait vitaminé sa musique à l'électrique sur Destination Anywhere en conservant ses textes âpres et poétiques. Je n'ai jamais pu mettre la main sur son dernier opus, Hunger, sortit en 1998. Partit en exploration sur la toile, je n'arrive pas à trouver d'informations sur Brenda Kahn au delà de 1999, mis à part sa participation à un album hommage à Elvis Costello. Le mystère de la chanteuse disparue...
Life dug holes in his face sorry and sad
the goal she said is to keep your head
and fit your life in the trunk of a yellow cab
Kahn est née dans le Connecticut in 1967, et elle a grandit (comme Springsteen tiens) dans le New Jersey. Au cours de ses études à la New York University, elle rencontre le mouvement Anti-folk qui a émergé dans le Manhattan's Lower East Side au milieu des années 80. Après un passage à Londres, elle sort Goldfish Don't Talk Back, sur un label indépendant de Brooklyn, Comm3 en 1990. Ce premier album a les qualités d'un premier album prometteur et les défauts afférents. Plein de vie, fouillis, fougueux, engagé, partant dans plusieurs directions musicales, un peu jazz, pas mal folk, rock, un poil d'esprit punk et franchement inclassable. Elle entame une tournée largement dans le Midwest qui lui servira d'inspiration pour plusieurs morceaux de l'album suivant. Remarquée, elle signe avec un grand label, Columbia, pour Epiphany In Brooklyn qui sort en 1993 avec la machine promotionnelle d'une major. Belle production, pour ce que je m'y connais, cet album reste son plus aboutit. La musique trouve une unité. Brenda Kahn développe un style original qui puise dans les grandes formes classiques américaines, country, folk et rock, au service d'une personnalité vive et sensible. Pas très loin, finalement, de quelqu'un comme Patti Smith. Proche aussi de Dylan, référence avouée, ou de Springsteen (voilà pourquoi...) façon Nebraska lorsqu'elle dresse ses portraits de gens simples, d'un quotidien en marge du grand rêve américain. Elle a le sens de l'image forte (les citronniers dans le désert), de l'humour et de bien jolies formules « She's in love with the man that she always wanted to be ».
He said, "I've read a great book everybody's read"
He said, "I hate my job and I wish I were dead
But if you feel inspired to jump in my bed
I might remember why I keep myself so well fed"
C'est à partir de là que les problèmes sont arrivés. Si j'ai bien compris, Columbia l'a lâchée en pleine préparation du disque suivant. Destination Anywhere sortira finalement en 1996 sur un label indépendant, Sanarchie. Retour à une diffusion plus confidentielle malgré des concerts très réguliers. Elle a alors une histoire d'amour et de musique avec Jeff Buckley qui joue sur l'album. Destination Anywhere est franchement rock, alternant morceaux énergiques (Reconcile et le superbe Yellow Sun) avec des ballades délicates (Lie, Song For Thomas). Faith Salons donne la part belle à un texte riche et quasiment récité, murmure envoûtant sur fond de la guitare de Buckley. Cette forme, elle continuera de l'explorer dans les albums suivants : Outside the Beauty Salons et Hunger. Le premier est enregistré en Allemagne, en octobre 1997 et sort aidé par un solide bouche à oreille, le soutien de Rolling Stone et une tournée européenne début 1998. L'album cherche à équilibrer les tendances des deux précédents. Brenda Kahn crée alors son propre label Rocket 99 Records pour Hunger qui marque le retour à l'acoustique, la force de son jeu de guitare. Elle s'implique également en faveur des femmes musiciennes et lance le site womanrock. Elle y gagnera le surnom : "the Punk-folk Priestess of the Lower East Side". Depuis, plus de nouvelles et surtout plus de musique. Est-celle partie faire pousser des citronniers dans le désert, trace-t'elle la route dans l'Indiana, est-elle restée au lit depuis le 4 juillet ? Brenda, vous me manquez.
Un entretien sur le site Mescalina (en italien et anglais)
15:45 Publié dans Morceaux en forme de poire | Lien permanent | Commentaires (10) | Tags : Musique, Brenda Kahn, folk | | del.icio.us | Facebook
Commentaires
Merci beaucoup pour cette article , je viens de reécouter l'album "Epiphany in Brooklyn" que mon grand frère avait obtenu par le billet d'un pote pendant son service national , donc ça date ... Ayant bien accroché , je mettais lancé aussi à sa recherche sur le web , mais vu que je ne connaissais pas l'orthographe de son nom , j'ai abandonné ...
Et aujourd'hui , ô miracle ! Mes deux neurones ont fonctionné en simultané ! Et là dans un éclair de clairvoyance lol , je vais sur le site des inrocks pour fouiller dans leur moteur de recherche , et hop ! J'ai trouvé ^^ Pas d'article rien , mais ce précieux nom que je cherchais depuis très longtemps ...
Encore merci pour l'article car c'est vrai que les infos se font très rares ;)
Écrit par : Michaël | 12/08/2006
Très heureux de rencontrer un amateur de la belle Brenda. J'espère que vous pourrez mettre la main sur ses autres albums même si "Epiphany..." reste son meilleur à ce jour. Et que je sache, il n'en est toujours pas prévu de nouveau, hélas.
Écrit par : Vincent | 14/08/2006
quel plaisir de pouvoir "communier" autour de la talentueuse miss kahn...je suis à la recherche de ses deux premiers albums, et j'avoue que la quête de ces deux "graals" restent sans suite, à mon grand desespoir....
je lance une bouteille dans votre mer....
Écrit par : alain | 10/03/2007
Bonsoir, c'est un plaisir aussi de croiser des admirateurs de BK. J'avais acheté le premier à sa sortie puis le second en le commandant à la FNAC tout simplement. Aujourd'hui, on les trouve d'occasion sur Amazon ( http://astore.amazon.fr/laboutique0d-21/403-2796214-8026812) et sans doute aussi sur e-bay. Les prix sur le premier sont exagérés mais le second semble être abordable. Je ne sais pas si cela vous aidera. Bonne quête.
Écrit par : Vincent | 10/03/2007
j'aime beaucoup ce qu'elle est, elle gagne à être écoutée d'ailleurs
Écrit par : julia | 27/09/2009
Merci de votre message, Julia. Espérons que nous aurons d'autres occasions de l'écouter !
Écrit par : Vincent | 27/09/2009
Comme quoi ! J'ai été fan du second Lp de Brenda kahn que j'avais découvert comme tout le monde en 93. Puis ensuite et pour toujours cette fois-ci et des le début de Jeff Buckley. De là à apprendre qu'ils se sont connus ! Comme quoi !
Écrit par : James | 24/09/2010
Merci de votre passage, James. Toujours un plaisir de recevoir un admirateur de Brenda Kahn. Elle vient de sortir son tout nouvel album (enfin !) mais à part sur son site, je ne sais pas encore comment me le procurer.
Écrit par : Vincent | 28/09/2010
Epiphany in Brooklyn est sans doute un des disques que j'ai le plus écouté.
Je me souviens avec une précision incroyable le matin ou j'ai entendu "My lover" à la radio en 1993 et comment le soir même je me suis précipité pour l'acheté (A cette époque pourtant je n'avais pas les moyens d'acheter de CD sur un coup de tête mais là je n'ai pas hésité une seconde)
Et je ne l'ai pas regretté!
J'ai ensuite moins accroché à ces albums suivants. J'ai toujours trouvé que les arrangements électriques affadissait sa musique.
Pourtant dans "Seven Laws of gravity" elle semble avoir trouvé l'équilibre parfait. Un trés bel album.
Écrit par : oli99 | 14/05/2011
Bonjour et merci de votre message. Je suis bien d'accord avec vous sur "Epiphany..." qui est vraiment un album qui m'a marqué. Aujourd'hui encore, je l'écoute toujours avec autant de plaisir. C'est vrai aussi que ce qui a suivi n'a pas tout à fait retrouvé ce niveau (quoiqu'il y ait de très belles chansons). je suis ravi d'apprendre que je ne suis pas seul a avoir acquit le petit dernier que je trouve aussi remarquable et sur lequel je pense bine me fendre d'un petit texte.
Écrit par : Vincent | 17/05/2011
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